Si quelqu’un cherchait à s’informer en écoutant les médias français (pas de panique, c’est juste une hypothèse hein…), cette personne reviendrait avec une conviction dans le domaine politique : Le libéralisme est une théorie économique prétendument efficace mais en réalité au service des riches et indifférente à ce qui est juste ou injuste.
Pour avoir une chance de comprendre ce qu’est le libéralisme, deux étapes sont donc indispensables :
a) Tourner le bouton de France Inter sur « »Off » ».
b) Pousser la porte d’une librairie
Le poussage de porte de librairies suivi du lecturage de philosophes politiques permettrait de découvrir l’inimaginable :
Le libéralisme n’est pas d’abord une théorie économique.
Le libéralisme est d’abord une tradition philophique qui se déploie dans de nombreux domaines, le domaine politique, le domaine du droit… Les conséquences politiques et juridiques se retrouvent bien sûr aussi dans les institutions encadrant l’activité économique, mais parler de ces institutions sans connaître la vision qui les soutient, c’est comme parler de la pointe d’un iceberg en ignorant ou en feignant d’ignorer qu’il y a aussi (beaucoup) de glace sous l’eau..
Sous l’eau, il y a l’affirmation que la raison, même imparfaite, permet d’approcher la connaissance de ce qui est juste. Et que ce qui est juste pour l’Homme, c’est de lui permettre de vivre en société tout en respectant son individualité, sa liberté.
Le cheminement pour parvenir à cette vision va d’Aristote à John Locke en passant par Thomas D’Aquin, Cicéron et Grotius, puis se prolonge au XIX, XX ème siècle par des penseurs libéraux comme Bastiat, Spooner, Ayn Rand, Rothbard, Bruno Leoni ou Bertrand de Jouvenel.
C’est la tradition du Droit Naturel.
La Tradition du droit naturel ne se confond pas avec le libéralisme, certains partisans du droit naturel ne sont pas libéraux, certains libéraux ne se reconnaissent pas dans la théorie du droit naturel mais plutôt dans l’utilitarisme.
Mais l’histoire du droit naturel et celle du libéralisme sont inséparables : c’est la tradition du droit naturel qui a enfanté du libéralisme au siècle des Lumières. Aujourd’hui les théories du droit naturel sont affinées, défendues et revendiquées principalement par des libéraux. On ne peut donc pas comprendre la vision du libéralisme sans connaître la tradition du Droit Naturel.
La théorie moderne libérale du Droit Naturel, c’est l’affirmation que :
– Il existe un ordre conforme à la nature humaine permettant aux individus de vivre en société sans renoncer à leur individualité et à leur domaine propre.
– La connaissance de cet ordre ne vient pas d’une révélation ou de la tradition mais de l’usage de la raison sur la nature humaine ou partant d’axiomes incontestables-.
– L’usage de la raison étant un effort incertain (et inégalement reparti), la découverte de la loi naturelle ne va pas de soi. Il s’agit d’une connaissance incertaine, perfectible, difficile mais accessible pour peu que l’on soit suffisamment sage, patient, humble…
– De cette loi naturelle, on peut déduire un certain nombre de Droits fondamentaux et universels pour chaque individu. Par exemple le droit à la sécurité, à la liberté et de propriété.
– Au sommet de cette reflexion, le Droit Naturel est le fruit des millions de jugements pris en conformité avec la loi naturelle, et découvrant petites touches par petites touches un ensemble de règles permettant de vivre harmonieusement ensemble en respectant l’individualité de chacun.
– Cet ordre préexiste à l’Etat. Les lois sont donc légitimes lorsqu’elles sont compatibles avec des règles -le droit naturel- permettant de respecter cette loi naturelle.
1955, Alabama. Il y a des lois racistes posées par l’autorité légale.
Ces lois ségrégationnistes ont été mises en place légalement, en respectant les procédures, par des autorités légitimes, démocratiquement élues.
Rosa Parks, couturière de 42 ans, est une délinquante : en décembre 1955, elle refuse d’obéir à la loi. Elle refuse de laisser sa place assise à un blanc dans le bus. Elle est donc arrêtée et punie d’une amende de 10$. Celle qui est « restée debout en refusant de se lever » va être le symbole du mouvement des droits civiques contre les lois ségrégationnistes.
Martin Luther King, 26 ans, est un pasteur, il connaît donc ses gammes théologiques. Parmi les belles touches, il y a l’un des plus grands théologiens de l’histoire du christianisme : Thomas d’Aquin. Ce dernier, au lieu d’opposer la raison et la révélation, les a marié. Dans la dot des jeunes mariés, il y a un cadeau venant du côté de la raison, une réflexion des penseurs grecs classiques (Aristote en particulier) sur la loi naturelle de l’homme.
Perché sur l’épaule de géants classiques, Martin Luther King bâtit le socle moral du mouvement des droits civiques (et les beaux discours qui vont avec) .
La loi naturelle, le droit naturel, la nature de l’être humain, ne sont pas des concepts religieux. En l’occurrence, ils sont nés dans l’antiquité grecque sans aucun lien avec son panthéon si rigolo.
Ils ont ensuite été développés chez les romains avant d’être effectivement repris par le christianisme puis à nouveau laïcisé au siècle des Lumières.
En d’autres termes, la loi naturelle comme le droit naturel est passé par ici, il est passé par là, mais il n’est pas né avec les monothéismes et s’en passe depuis le siècle des Lumières.
Ces concepts viennent donc d’abord de la philosophie classique grecque. Ils sont le fruit de l’usage de la raison sur la nature des choses.
A contrario, le travail des théologiens est de faire usage de la raison, non pas sur la nature des choses, mais sur un texte saint, sur une révélation.
Cela ne veut pas dire que le fruit de ces deux travaux s’opposent, des philosophes croyants ont mariés les deux habilement.
Certaines prescriptions du judaïsme comme du christianisme ressemblent comme deux gouttes d’eau à celle du droit naturel mais le papa et la maman du droit naturel, c’est la philosophie et la raison. Pas la religion et la révélation.
En entendant le terme « droit naturel », l’autre réflexe immédiat est de le classer dans les niaiseries assez vieille droite entre « droit de cuissage » et « sexe des anges ».
Un truc de réactionnaire obsolète à des années lumières de la vigoureuse pensée postmoderne dans lequel nous baignons tous avec bonheur : l’esprit Canal sans prise de tête mais avec les tabous en acier du coolinisme politiquement correct.
Ben non, aujourd’hui comme hier, le droit naturel n’est pas un truc de réactionnaire.
Il s’oppose au code de lois des réactionnaires, code de lois indiscutables parce qu’il vient des ancêtres et les ancêtres ont toujours raison même quand ils ont tort.
Et il s’oppose aux progressistes socialistes avec leurs lois informes et caoutchouteuses réinventées tous les deux jours sans considération pour la Justice afin de forcer la marche vers leur société parfaite.
Le droit naturel est lui basé sur une idée de justice universelle et de la nature humaine, idée humblement et lentement découverte par l’usage de la raison.
Les partisans du droit naturel se retrouvent donc coincés entre les réactionnaires et les progressistes socialistes.
Tiens, c’est aussi la place des libéraux…
Cela n’est pas grave… Ce n’est pas comme s’ils allaient se disputer l’espace : les libéraux et les partisans du droit naturel sont souvent les mêmes.
Les partisans du droit naturel pensent donc :
Étage 1) La raison est un outil capable de connaître des propositions universellement vraies. Cela ne veut pas dire que tout le monde, tout le temps accède à des propositions universellement vraies… c’est même plutôt le contraire, la raison n’étant pas infaillible ni répartie également… Cela veut dire que cette tentative est possible.
Étage 2) Non seulement la raison peut connaître des trucs vrais, mais en plus ça tombe bien, il y a des trucs vrais à connaître, en particulier sur la nature de l’Homme. Et sur la loi naturelle, c’est-à-dire un ordre intemporel et universel souhaitable et conforme à la nature de l’Homme. Par exemple (je dis -presque- n’importe quoi) « la nature de l’Homme est d’éviter la mort violente »; « La nature de l’Homme est de vivre en société. »
Étage 3) On peut déduire de cette loi naturelle ou de la nature de l’Homme un certain nombre de droits naturels de l’Homme. (Droit à la sécurité, droit à la propriété)
Étage 4) A partir de cette connaissance, même approximative, même à affiner, des jugements permettent de régler les conflits au cas par cas. De cette infinité de jugements émerge un droit naturel qui peut être variable selon les cultures ou les époques mais qui respecte la loi naturelle, c’est-à-dire qui respecte l’autonomie de l’individu tout en lui permettant de vivre en société. Par exemple « Puisque l’Homme a droit à la sécurité, alors il est interdit rouler sur un individu avec un 4*4 » ou « Puisque l’Homme a droit à la sécurité, il est interdit de marcher sur un individu avec un chameau ».
Étage 5) La dernière « couche », étant donc la loi posée par les Etats. La loi posée par les États, loi positive, doit se conformer au Droit Naturel pour être une loi juste.
Il y a donc cinq étages.
Les débats qui ont eu lieu à chaque étage de ce raisonnement remplissent des bibliothèques entières… Et ils vont probablement encore remplir des TetraOctets de mémoire optique quantique tetradimensionnelle en silicium jupiternien dans les prochains siècles.
Le droit naturel a de nombreux adversaires.
D’abord les utilitaristes, (y compris libéraux comme Bentham ou Mill) pour qui la qualité des institutions doit se juger à leur utilité (et non à leur respect de la justice).
Et l’utilité pour les êtres humains, c’est le bien être.
Le problème c’est que l’utilité d’un serial killer n’est pas la même que celle d’un altruiste. Et sans réflexion sur ce qui est juste en dehors de toute utilité, on voit mal pourquoi favoriser l’un plutôt que l’autre. D’autant que c’est impossible à quantifier (Mettez sur une échelle de 1 à 10 le plaisir ressenti par le serial killer avec le plaisir ressenti par l’altruiste…) Et que cela se complexifie encore lorsqu’il s’agit de trouver une utilité moyenne (Sur une île, dix sadiques ont plus de plaisir que le déplaisir de trois victimes, donc la torture doit être légale, elle maximise le bien être dans la société. C’est la vie bonne !)
L’utilitarisme, malgré de nombreuses tentatives sophistiquées pour échapper à certaines de ses conséquences, revient à son point de départ : sans une réflexion sur ce qui est juste, l’utilité est parfaitement compatible avec des sociétés cauchemardesques.
L’autre grand mouvement hostile au droit naturel est le scepticisme dont la branche comtemporaine, le postmodernisme, est la plus influente.
Pour les postmodernes, la raison est incapable d’arriver à une idée de la justice universelle, il n’y a que des justices particulières, selon les cultures, les ethnies, les sexes, les classes sociales etc… Justices incompatibles, cherchant à se dominer les unes, les autres. La modernité, l’idée d’une raison universelle ne sont selon eux que les caractéristiques d’une culture -occidentale, bourgeoise, blanche etc..- ayant malheureusement dominée toutes les autres.
Cela donne le fameux politiquement correct et toutes ses joyeusetés.
Ces discours sont aujourd’hui ultradominants, même si dans les faits nous vivons encore en partie sur l’héritage du droit naturel et des Lumières -en oubliant ce que nous leur devons-.
Avant de même de savoir s’il existe une nature humaine et quels sont les droits qui permettent de la respecter, il faut d’abord être convaincu que la raison est un instrument assez fiable pour la connaître… Après tout, si une nature humaine existe mais qu’on ne peut pas la connaître, cela ne sert à rien de se tracasser…
Et il se trouve que tout le monde n’est pas convaincu que la raison permette de connaître quoi que ce soit. En particulier quelque chose sur la nature humaine.
Il y a les douteurs de la raison niveau 1. Kant. Nous sommes coupés à jamais de la réalité par nos sens ou les catégories de notre esprit. La raison permet toutefois de s’assurer de la cohérence interne de nos raisonnements.
Les douteurs de la raison niveau 2 : Hume et dans sa foulée la sociologie. La raison est l’esclave de nos passions. Elle peut éventuellement nous permettre de déterminer le meilleur moyen d’arriver à nos fins (par exemple comment respecter la loi naturelle une fois que nos passions se sont fixées sur une loi naturelle), mais elle est incapable de déterminer nos « meilleures » fins (la loi naturelle). Seules nos passions, nos sentiments les déterminent.
Les douteurs de la raison niveau 3 : Marxisme, Historicisme. La raison n’est pas même l’esclave de nos passions, parce que nous n’avons pas nos propres passions, mais les passions de notre culture, de notre période historique, de notre classe sociale dont nous sommes prisonniers.
Les douteurs de la raison niveau 4 : Postmodernisme : C’est une prétention de croire que l’homme peut raisonner, il se contente d’asséner des propositions sans queue ni tête, même en logique formelle.
La raison est-elle une fonction cognitive efficace pour guider nos actions ou pas ?
La raison est-elle capable de fonctionner de manière autonome par rapport à la culture, la classe sociale, l’identité sexuelle, etc.. pour atteindre des vérités universelles ?
Les partisans du droit naturel répondent oui à ces deux questions.
Attention, il ne s’agit pas d’un culte déraisonnable à la raison ne laissant aucune place à l’émotion, aux sentiments ou à la foi : un scientisme délirant. Il s’agit d’affirmer que sur des périmètres donnés de la connaissance, la raison est un outil irremplaçable, efficace et prépondérant.
La connaissance doit-elle se baser sur l’expérience, sur l’observation de la nature -au risque d’être troublée par nos sens- ou sur la logique pure -au risque d’être inopérante dans la monde réel- ?
Cette dernière question, dépassant largement le cadre de la philosophie politique, divise aussi les partisans du droit naturel entre ceux qui fondent le droit naturel sur l’observation de la nature de l’homme (Locke, Rothbard) et ceux qui le fondent sur des axiomes irréfutables (par exemple : pour argumenter, il faut être un individu doté du langage) (Kant, Nozick).
La modernité et le libéralisme sont les deux frères jumeaux du siècle des Lumières. La raison triomphe de la superstition, l’individu du collectivisme féodal. Les modernes divergent sur beaucoup de choses mais tous sont d’accord pour considérer que la raison est l’outil efficace pour comprendre le monde.
D’ailleurs, le premier adversaire du libéralisme, le communisme, veut encore battre ce dernier sur son terrain : celui de la raison.
Le communisme se veut d’abord scientifique. Mieux capable d’organiser la production et la société que la main invisible du libéralisme.
Un siècle plus tard, sur le terrain de la théorie comme de l’expérience, le communisme est battu à plate couture. Les économistes libéraux expliquent pourquoi une économie centralisée sera forcement moins efficace qu’une économie libérale dans laquelle les prix transmettent l’information, tandis que les Russes font la queue pour un rouleau de papier toilette et trois bananes.
Devant ce KO debout, les adversaires du libéralisme ne veulent plus jouer sur le terrain de la raison et de l’expérience : « le libéralisme, il gagne tout le temps, c’est pénible à la fin. »
Un mouvement de fond venu de l’extrême gauche s’attaque à l’héritage des Lumières. L’objectivisme basé sur la raison et l’expérience est remplacé par le subjectivisme culturel. La raison est un mythe, l’harmonie un masque cynique de la domination, la vérité une chimère.
Le postmodernisme et le politiquement correct, sa branche activiste, sont une attaque en règle contre les fondements du libéralisme et de la modernité. Une attaque d’une violence et d’une arrogance assez paradoxale compte tenu du relativisme tout azimut proposé par ses petits soldats.
La « nature » de droit naturel ne fait pas référence à la nature, les petits zoizeaux, le shampoing à la camomille, la jungle ou l’herbe verte, mais à la nature de quelque chose.
« Nature : ensemble des caractères fondamentaux propres à un être ou une chose » comme dit si bien un gros livre un peu ennuyeux à lire de A à Z mais si pratique pour comprendre une langue.
La nature d’un pont est par exemple d’enjamber un obstacle.
La nature humaine est beaucoup plus compliquée à définir que la nature pontaine. Beaucoup d’ailleurs affirment, soit qu’elle n’existe tout simplement pas, soit qu’elle est totalement dominée par la culture.
A contrario, pour les défenseurs du droit naturel, par delà les cultures, les périodes historiques, les trajectoires personnelles, il existe un certain de nombre de choses communes à tous les êtres humains.
Il existe une nature humaine.
Le fait qu’il y a une nature pontaine ne signifie pas que tous les ponts la respectent.
Il peut y avoir des ponts « malades », un gros trou au milieu du tablier.
Il peut y avoir des ponts mal conçus : un pont dont le tablier vibre dangereusement au passage des véhicules.
Toujours est-il que le métier d’un ingénieur consiste à corriger le pont pour que celui-ci soit conforme à sa nature de pont. Le fait que des ponts s’éloignent de leur nature n’est en aucun cas la preuve que la nature pontaine n’existe pas.
De même la nature d’un poumon est de collecter l’oxygène de l’air pour le donner à l’organisme.
Mais certains poumons sont mal formés, d’autres sont atteints d’un cancer. Le métier de pneumologue est de faire en sorte que les poumons se conforment à leur nature pulmonaire. Là encore le fait que certains poumons s’éloignent de leur nature pulmonaire ne remet pas en cause l’existence d’une nature pulmonaire. Le fait que nous ne connaissions pas tout de la nature pulmonaire ne remet pas en cause son existence.
Et s’il n’y avait pas de nature pontaine comme de nature pulmonaire, on voit mal comment un ingénieur ou un médecin pourraient exercer leur métier. Qu’est ce qu’ils guériraient ou répareraient s’ils n’avaient pas un modèle idéal vers lequel faire tendre le poumon ou le pont ?
De même, le fait que des hommes s’éloignent de la nature humaine n’est en rien un signe d’absence d’une nature humaine.
Un premier fait incontestable : nous sommes vivants.
(Si des zombies lisent ce document, je suis flatté d’avoir une telle variété de lecteurs, mais je suis obligé de leur annoncer que leur appartenance au genre humain est désormais plus que discutable -en particulier à cause de leur appétit pour les cerveaux humains vivants- et donc que la nature zombaine est différente sur de nombreux points de la nature humaine.)
Le fait que nous soyons vivants est difficilement contestable. D’autant plus que pour contester quelque chose, être vivant, ça aide.
D’une manière générale, on ne peut rien faire sans vivre. Agir, penser nécessite d’être vivant. Y compris d’ailleurs pour se suicider, pour tuer ou pour désirer la mort. Vivre est le préalable incontournable d’une existence humaine.
Les partisans du droit naturel constatent grâce à un effort (très important) de la raison que la nature de l’Homme est d’être vivant.
L’une des objections majeures contre le droit naturel est que selon certains penseurs (David Hume), on ne peut pas tirer une valeur, une norme d’un fait.
Le fait que nous soyons vivants, n’implique pas que respecter la vie est juste. Le fait que beaucoup d’hommes vivent en société ne permet pas d’affirmer que vivre en société est juste.
La nature constituant un ensemble de faits on ne peut pas en tirer une norme, un système de valeurs comme le droit naturel. De ce qui est on ne peut déduire ce qui doit être.
Par exemple, le syllogisme suivant n’est pas valide :
B) Le respect de la nature humaine est nécessaire pour vivre dans une société harmonieuse et respectant l’autonomie des individus.
C) Vous êtes un individu vivant en société
D) Donc vous devez respecter la nature humaine.
La norme D n’est pas déductible de faits B et C, même si B et C sont vrais.
Il manque une prémisse, un petit (A) qui introduit un choix :
A) Vous souhaitez vivre dans une société harmonieuse et respectant l’autonomie des individus.
A partir du moment où il s’agit d’un choix, le droit naturel ne devient plus qu’une option parmi d’autres. Option que tous ceux qui n’aiment pas les sociétés harmonieuses ou respectant l’autonomie des sujets ne choisiraient pas.
Aujourd’hui encore, le petit problème du fondement d’une morale donne lieu à une bataille intellectuelle complexe qui dépasse largement le cadre du droit naturel. Les réponses des partisans du droit naturel sont parmi les suivantes :
a) L’axiome d’argumentation (voir en face)
b) La distinction entre faits et valeurs ne concerne le droit naturel qu’à la fin du débat : Est ce une obligation morale de respecter le droit naturel ? Ce qui vient avant, nature de l’homme, loi naturelle, droit naturel -qui est le plus polémique- n’est pas concerné par l’objection de Hume.
c) Dieu ou un texte sacré (Bible, Coran, Bouddha) me commande A.
d) Je ne veux pas avoir comme voisin quelqu’un qui ne souhaite pas A. Sa place est en prison, en exil ou dans un cimetière et j’ai le droit de prendre des dispositions pour me défendre préventivement contre un tel voisin.
e) C’est celui qui dit qui est. Les arguments utilisés pour contrer les théories de la loi naturelle font appel à des éléments des théories de la loi naturelle.
Nous sommes seuls dans notre tête (si vous entendez des petites voix en plus de votre monologue intérieur, il va falloir être fort : ce n’est pas Elvis qui vous parle. Vous avez juste oublié de prendre vos petites pilules ce matin).
Seuls les individus, et non pas les groupes, ressentent les émotions. Certes la victoire de onze sportifs courant derrière une baballe peut mettre en transe un grand nombre d’individus à la fois, mais il n’y a pas d’entité « Groupe de supporteurs » qui ressentirait une émotion de manière distincte des individus. Seul un individu aime, compatit, envie, jalouse ou déteste.
Seuls les individus peuvent expérimenter, aimer, raisonner. Nous ne pouvons bien sûr pas fusionner nos corps (une grosse dizaine de centimètres les soirs de tendresse, cela reste une fusion superficielle), ni nos esprits, pas possible que nos esprits se retrouvent tous ensemble dans un plasma humanoïde entourant la planète Terre, même en sautillant très haut après avoir avalé des champignons mexicains.
Il n’est bien sûr pas possible de diviser en deux ou trois un seul corps ou esprit (pas de mini-moi 1, mini-moi 2 etc..).
Nous sommes donc nés individus et restons individus toute notre vie.
Cette évidence fait beaucoup de peine à tous ceux qui veulent surplomber l’humanité en un coup d’œil puis avec cette belle terre glaise sociétale faire des sociétés qui leur plaisent.
C’est d’autant plus surprenant que les individus qui veulent faire de la poterie avec l’humanité ont en général une conscience aiguë de leur propre individualité, voire de leur égo surdimensionné qu’ils aiment bien voir affiché en 4 m * 3 m dans la rue ou sur les plateaux TV.
Troisième constatation sur la nature humaine :
Nous sommes dotés de la raison et du langage. Même si en ce qui concerne la raison, cela ne saute pas aux yeux pour tout le monde.
Ceci n’est pas un petit détail. Cela nous distingue de nos amies les bêtes.
La loi naturelle humaine, ce n’est pas la loi du plus fort, ce n’est pas la loi de la jungle, parce que les Hommes ne sont pas des bêtes : ils possèdent la raison et le langage pour argumenter au lieu de tuer, pour réfléchir au lieu de suivre leur instinct.
Les Hommes ne sont pas des bêtes, ils sont beaucoup plus que des bêtes. Pourquoi après quelques décennies de nihilisme deep écolo machin truc, cette évidence semble presque incongrue ?
Quatrième constatation, nous aimons bien passer du temps avec nos semblables. Rares sont les personnes qui ne veulent (ne peuvent) voir personne, jamais. De fait, il y a certes parfois quelques ermites, des enfants loups ou un robinson malgré lui, mais rares sont les êtres humains qui vivent seuls tout au long de leur existence.
L’Homme aime bien vivre avec ses semblables, même pour ronchonner ensuite.
Que ce soit dans un état de nature ou dans une cité, l’Homme est un individu certes, mais un individu qui vit en société. C’est mieux pour aimer, pour se protéger, pour échanger, pour travailler, pour jouer. C’est mieux.
Cette vie en société n’est pourtant pas celle d’une termitière constituée d’ouvrières interchangeables ni d’extraterrestres fusionnant dans un plasma télépathique. L’Homme est et reste un individu même au contact de ses semblables.
La nature de l’Homme est donc d’être et de rester un individu, un individu vivant en société.. Kaie.. Kaie..kaie… La nature des plasmas de termites extraterrestres télépathiques est sans doute moins problématique.
Tendre vers la vertu fait-il partie de la nature humaine ?
Bon, on sait déjà soit par l’expérience (la nature de l’homme est de vivre en société), soit par la logique (pour argumenter, il faut être un individu avec des normes communes) que la nature de l’homme est d’être un individu vivant en société.
Mais est-ce dans la nature de l’Homme de tendre vers la vertu ?
Oui, chez les philosophes classiques. La nature de l’homme se définit (surtout) par sa finalité. Sa fin est de tendre vers la vertu.
Non mais oui, chez les philosophes modernes libéraux (Locke). Non, la nature de l’homme n’est pas inscrite dans sa fin -qui peut être celle d’un sage ou d’un imbécile médiocre- mais dans ses caractéristiques propres et indiscutables.
La vertu est une chose respectable vers laquelle un gentilhomme doit naturellement tendre, mais elle peut varier selon les croyances.
Cette neutralité sur la vertu est l’un des points de clivage entre les conservateurs -de droite comme de gauche- et les libéraux.
Les conservateurs -qu’ils soient de droite ou de gauche- souhaitent que l’Etat fasse tendre les citoyens vers la sagesse.
Oubliant au passage qu’une immense partie de la population n’a pas besoin de l’Etat pour rechercher la sagesse sous une forme ou sous un autre.
Oubliant que la vertu imposée par l’Etat n’a qu’un lointain rapport avec la vertu et l’élévation vers l’esprit noble, mais est le plus souvent un culte au collectivisme ou à la gloire de l’Etat.
Oubliant surtout qu’utiliser l’Etat pour faire tendre les citoyens vers une vertu officielle, c’est provoquer la discorde avec tous ceux qui se reconnaissent dans une autre vertu. Le droit naturel moderne s’est développé à la fin des guerres de religions, ce n’est pas par hasard.
Donc nous avions déjà la nature, voici la loi naturelle.
Comme son nom ne l’indique pas, la loi naturelle n’est pas une sorte de super-code des lois : Fais ceci, Fais pas cela..
Le terme « loi » n’est pas pris ici dans le sens d’une règle à respecter mais d’un ordre des choses souhaitable ou respectable. Un ordre des choses conforme à la nature de l’objet auquel il s’applique. Par exemple la nature d’une sardine est de nager dans une eau de mer à 4 degrés. La loi naturelle de la sardine, l’ordre souhaitable conforme à la nature de la sardine, c’est la mer salée à 4 degrés…
La nature pontaine est donc d’enjamber des obstacles pour permettre de les franchir. Un ordre des choses conforme à la nature pontaine serait donc l’absence de guerre qui détruit les ponts, l’absence de tremblements de terre.
La nature de l’œuf au plat est d’être ni baveux, ni d’être crevé. L’ordre conforme à sa nature est une poêle avec de l’huile à la bonne température sans cuillère de bois trop agressive.
La nature d’un train est de rouler sur des rails. L’ordre souhaitable et conforme à sa nature de train, la loi naturelle du train, est donc un réseau ferré en bon état.
La nature d’un calendrier de la poste est d’avoir des photos kitchs de petits chiens. La loi naturelle d’un calendrier la poste, c’est euuh… bon je fatigue un peu avec les exemples pas super éclairants d’autant que nous devons nous préparer au grand saut : la loi naturelle de l’homme.
Autant souffler un peu..
La loi naturelle est donc un ordre permettant de respecter la nature de l’homme.
La nature de l’homme est d’être un individu libre vivant avec les autres.
L’ordre conforme à cette nature est donc une société basée sur des relations permettant à chacun de coopérer tout en gardant son autonomie.
Ce sont des relations fondées sur la parole entre personnes égales par opposition à des relations fondées sur la violence ou le commandement entre un souverain et son sujet.
Ce sont des relations où l’individualité de chacun est préservée. On ne confond pas un individu et un autre.
« Relations d’égal à égal » signifie que personne n’a le droit de diriger un autre sans son consentement. Un salarié, un fournisseur peut accepter des ordres d’un chef, d’un client mais dans la cadre d’un contrat qu’il est libre de rompre.
Par contre, nul ne peut être esclave ou même simplement obligé d’obéir à des ordres sous la contrainte d’un commandement à cause de sa naissance ou de n’importe quelle contrainte unilatérale fixée par les institutions.
Les relations basées sur la parole signifient que ce n’est pas la violence physique qui encadre un échange, mais l’argumentation, l’engagement, la parole d’un Homme vis-à-vis d’un autre.
La loi naturelle humaine, c’est l’ordre souhaitable conforme à la nature de l’homme, c’est-à-dire les relations de convivialité d’égal à égal, respectant la liberté, l’individualité de chacun et excluant la violence, les relations de commandement.
Dans le contexte de la loi naturelle, vivre en société n’est pas une collection approximative de « droits-créances » couplée à un Etat Nounou qui commande, cogne et soigne.
Il s’agit de relations justes entre des individus pris un à un.
Il ne s’agit pas de relations de commandements et de contrôles entre une bureaucratie qui décide et des citoyens qui obéissent, que cela soit pour leur sécurité, leur confort, leur éducation, leur culture, leurs loisirs, leur santé, leur travail, leur commerce.
Il s’agit de relations (sentimentales, culturelles, économiques) entre personnes égales entre elles, respectant l’individualité, la parole, la liberté, la propriété de chacun.
Il ne s’agit pas du contrôle et de la gestion par la coercition d’immenses petits tas d’individus regroupés articificiellement par un ou deux critères parmi des milliers d’autres. Il ne s’agit pas des relations arbitraires fixées par l’Etat entre des groupes d’individus (selon la classe sociale, raciale, religieuse, sexuelle), groupes aux contours arbitraires et très réducteurs pour les membres de ces groupes.
Il s’agit de milliards de relations distinctes et justes entre individus libres et égaux quels que soient leur classe sociale, race, religion ou sexe.
Le sage féru de ponts va donc déterminer grâce à l’usage de sa puissante raison que la nature d’un pont est d’enjamber les obstacles. Maintenant que son cerveau est chaud, il ne va pas s’arrêter en si bon chemin.
Il va en profiter pour déterminer des droits aux ponts permettant de respecter la nature du pont ou la loi naturelle pontaine.
Par exemple, il pourrait écrire un truc comme :
« Constatant que la nature des ponts est d’enjamber les obstacles, nous déclarons :
Article I
Chaque pont a le droit à la sécurité de son tablier. Nul ne doit faire des trous dans le tablier d’un pont.
Article II
Chaque pont a le droit ….
.. »
Il y a donc bien deux taches distinctes pour le sage en nature de Pont (on appelle aussi ça un ingénieur du bâtiment, mais c’est moins classe).
a) Déterminer la nature du pont et/ou la loi naturelle conforme à la nature du pont.
b) Déterminer les droits naturels du pont ou les obligations du pont permettant de respecter cette nature.
Double usage de la Raison, Double discussions possibles, Double manière de se tromper. Et c’est pas fini, il y a d’autres étapes…
Des conservateurs et certains libéraux contestent donc l’utilité d’un passage par une déclaration de droits pour fonder le droit naturel.
Pour eux, le droit naturel doit s’appuyer sur une loi naturelle attachée aux relations entre individus et non sur des droits attachés directement aux individus. Fonder le droit naturel sur les « individus seuls » et non sur les « relations entre individus » n’est pas anodin. Il en découle selon eux un grand nombre de dysfonctionnements :
Pour eux, les droits naturels oublient l’autre pendant du respect de la nature humaine et des conditions d’une société harmonieuse : les obligations et les devoirs.
De plus cette formulation peut potentiellement inciter les étatistes à multiplier à côté des droits naturels, des faux droits, les droits créances.
Ces reproches ne sont pas infondés, mais bien comprise, la formulation des droits naturels affirme en quelques mots les conditions d’un respect de la nature humaine, et permet de s’opposer clairement aux multiples violations que le Droit Naturel subit de la part des puissants d’hier ou d’aujourd’hui.
Et contrairement à ce qu’affirment les conservateurs, les droits naturels n’orientent pas le droit naturel vers un chemin radicalement différent de celui pris en leur absence.
Enfin la loi naturelle « objective » n’est pas incompatible avec la formulation des droits naturels, elle est sans doute même incomplète sans elle.. La notion de Droits subjectifs ne date pas de l’époque moderne, mais apparait de l’époque classique jusqu’au canoniste du 13 ème siècle.
La Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 s’appuie le droit naturel, les droits naturels.
Celle de 1948 est devenue -sous l’influence de l’URSS- une liste à la Prévert de droits créances, de droits sociaux, de droits de deuxième génération, des droits de troisième génération (si, si ça vient de sortir)… tous opposés aux droits naturels.
Or les droits ne se reproduisent pas comme des lapins quoiqu’en pensent les bureaucrates démagogues qui font cet élevage en batterie depuis maintenant un demi-siècle pour notre plus grand malheur.
Un droit naturel ne donne comme seule obligation aux autres de s’abstenir d’interférer dans les actions d’un individu -dans le mesure bien sûr où il respecte les droits naturels des autres.-. Il préexiste à l’Etat et pourrait donc se passer totalement d’institutions coercitives.
Un droit créance oblige les autres à se mettre au service d’un individu : pour lui donner un logement, ou un travail. Il viole les droits naturels -tout en s’avérant incapable d’ailleurs de fournir quoique ce soit. En URSS, le droit au logement permettait surtout à trois familles de vivre dans un seul appartement. Les droits créances n’existent que parce que l’Etat existe.
Les droits créances ne sont pas des compléments des droits naturels, ils en sont l’ennemi mortel.
Sacrifier les droits naturels pour des droits créances, c’est affaiblir définitivement la liberté en général pour obtenir un avantage particulier ponctuel au détriment des autres.
C’est passer d’un Etat au périmètre bien défini et limité à un Etat Nounou au périmètre flou et potentiellement sans limite.
C’est donner le prétexte à tous les étatistes pour étendre encore et encore leur pouvoir.
Tous les Hommes sont des individus vivants, autonomes et dotés de la raison.
Il n’y a donc pas de surhommes, de sous-hommes, d’Homme du Haut, d’Homme du bas, d’Homme de droite, d’Homme de gauche (ah si, il y a des hommes de gauche, mais personne n’a jamais pu expliquer ce que cela signifiait vraiment).
Si tous les Hommes sont identiques sur ce qui fonde leurs Droits Naturels -leur nature donc pour ceux qui suivent- ils ont donc les mêmes Droits Naturels.
Ce qui se traduit par le fait qu’ils sont égaux devant la loi posée par les Etats -en tout cas, lorsque celle-ci est conforme aux Droits Naturels-.
Autant dire que grouper les individus en petits tas pour donner par la loi des avantages ou des obligations spécifiques à certains individus selon leurs petits tas n’est pas conforme au Droit Naturel.
Ca tombe mal : grouper les individus en petit tas pour arroser ou pour assécher les individus d’un groupe par rapport aux autres groupes, c’est le business model de la classe politique actuelle.
Entre le business model de la classe politique actuelle et le Droit Naturel, il va donc falloir choisir.
En même temps, ce n’est pas comme si ce choix était douloureux..
L’égalité devant la loi, l’égalité en droit, celle mentionnée dans la devise de la République, est donc conforme au droit naturel.
L’égalité de fait, c’est-à-dire l’égalité d’une variable parmi d’autres caractérisant un individu (ou son domaine propre) sur l’ensemble de la population est le principale adversaire de l’égalité.
Pour obtenir l’égalité de fait, il faut bien sûr favoriser certains individus au détriment d’autres. C’est donc le contraire de l’égalité en droit.
L’égalité de fait ne concerne d’ailleurs bizarrement que certaines variables : le revenu… Rien sur l’égalité sentimentale par exemple…
Ou l’égalité sexuelle.. Pourtant, c’est important une vie sexuelle heureuse pour une vie bonne. Pourquoi l’Etat ne forcerait-il pas les heureux en amour à faire quelques câlins aux malheureux… Pardon aux défavorisés…
Et la vie spirituelle ? Un arriviste, grand défavorisé en matière de vie spirituelle, qui a tout sacrifié pour accumuler des biens matériels est volé par l’Etat en faveur de celui qui a favorisé sa vie spirituelle en accumulant moins de richesses sans que l’Etat ne force ce dernier à partager sa vie spirituelle avec l’arriviste. C’est pas juste !
On voit bien que la lutte contre les inégalités est un projet sans fin.
En réalité, l’égalité de fait ne sera jamais atteinte sauf lorsque nous serons tous des schtroumpfs clonés avec des pyjamas blancs. Et encore cela ne suffira pas, il faudra aussi des puces électroniques envoyant des décharges électriques à chaque pensée différente (lutte contre les inégalités culturelles).
La lutte contre la pauvreté est une ambition respectable. La lutte contre les inégalités réelles est un projet totalitaire, par essence interminable, dont les uniques bénéficiaires sont les bergers chargés d’égaliser le troupeau.
[Dans l’état de nature] « Si chaque homme a le droit de défendre, même par la force, sa Personne, sa Liberté, sa Propriété, plusieurs hommes ont le Droit de se concerter, de s’entendre, d’organiser une Force commune pour pourvoir régulièrement à cette défense.
L’Individualité fait donc partie de la nature de l’Homme.
Une autre violation de la nature de l’Homme serait de nier son individualité.
Le traiter comme une non-personne – une fraction d’un groupe – ou confondre ses actions et ses paroles avec celles d’un autre.
Le traiter comme une non-personne, c’est le traiter comme un moyen, un outil passif que l’on emploie sans se soucier de son consentement, ou même contre son consentement.
Respecter son consentement, c’est respecter sa liberté.
Un droit naturel qui permettrait de respecter la nature de l’homme sur ce point là pourrait donc s’écrire : « L’Homme a un droit naturel à la liberté. »
Ou dit différemment, « L’Homme a l’obligation de respecter la liberté/le consentement des autres ».
La liberté naturelle est donc la possibilité de refuser d’entrer dans un échange dont les termes ne vous conviennent pas.
Le droit de s’abstenir d’échanger ou d’agir.
« Non, Monsieur l’Escroc je ne souhaite pas échanger avec vous. »
« Non, Monsieur le Tortionnaire, je ne souhaite pas échanger avec vous. »
« Non, Monsieur le Violeur, je ne souhaite pas échanger avec vous. »
« Non, Monsieur l’Honnête Homme, je ne souhaite pas échanger avec vous. »
« Non, Monsieur le PDG, je ne souhaite pas échanger avec vous. »
« Non, Monsieur le bureaucrate, je ne souhaite pas échanger avec vous. »
« Non, Monsieur le Chef Religieux, je ne souhaite pas échanger avec vous »
Parce qu’elle est le droit de s’abstenir d’échanger, le droit de dire « non » à un échange non désiré, les communistes et aujourd’hui les sociaux-démocrates ont balancé par-dessus bord la liberté naturelle en expliquant qu’elle n’était pas suffisante pour éliminer la souffrance ou même simplement la frustration.
Pas suffisante, peut être. Mais indispensable, certainement. Le XX ème siècle aurait eu un tout autre visage, si les Etats avaient simplement respecté la liberté négative de chaque individu.
Ah bah tiens, le XIIX ème aussi. Et celui d’avant aussi. Et celui d’avant, avant aussi…
Peut être qu’au XXI ème, ca vaudrait le coup de commencer à essayer de respecter la liberté naturelle. Juste pour voir.
La liberté est parfois confondue avec son faux-ami : « la capacité ».
Etre libre, ce n’est pas la même chose qu’être capable.
Si nous sommes libres d’écrire un opéra, cela ne veut en aucun cas dire que nous en sommes capable.
Nous avons un droit naturel à la liberté d’écrire un opéra, en aucun cas nous avons un droit naturel à la capacité d’écrire un opéra.
Nous sommes libres d’aller en vacances à la plage, cela ne veut pas dire que nous en avons la capacité (financière).
Nous sommes libres de faire des gros câlins entre adultes consentants, mais ce n’est pas un droit à de gros câlins. Cela impliquerait pour les autres un devoir de faire des gros câlins. Le droit de l’amour libre n’est pas le droit du viol.
Un droit à la liberté est lié à la nature de l’Homme, un individu doué de sa propre raison dont il peut user pour guider son action.
Un droit à la capacité n’est pas lié à la nature de l’Homme sauf à considérer qu’il est dans la nature de l’Homme d’être un Dieu omnipotent, un Dieu ayant une capacité sans autre limite que ses envies.
La liberté, c’est celle de pouvoir penser, agir, échanger sans être entravé par les autres (dans la limite du respect des droits naturels des autres.)
C’est un droit dont tout le monde peut jouir, de manière égale.
Un droit à la capacité au contraire exige que les autres travaillent, agissent sans leur consentement pour vous écrire un opéra, pour vous payer des vacances à la plage, pour vous faire un câlin.
C’est un droit qui est forcément inégalitaire (certains prennent la capacité des autres), qui transforme les autres en moyens, qui viole le droit naturel à la liberté. Ceausescu, Staline ou Kim Sug avaient des droit à la capacité presque sans limite. Leurs peuples, par contre, n’avaient plus aucun droit.
La confusion entre droit à la liberté et droit à la capacité est permanente chez les étatistes. Forcément le droit à la liberté limite leur pouvoir, le droit à la capacité est un prétexte sans limite pour l’augmenter.
La liberté est donc difficile à défendre parce que chacun fait un usage différent de la liberté.
Le collectionneur de petites cuillères n’a parfois pas beaucoup de considération pour la liberté du surfeur, l’amateur de Bordeau pour celle du fumeur de marijuana fraiche.
Même si je n’ai aucun usage de la liberté de faire des vaccins, -je ne sais pas faire de la recherche médicale- j’ai tout de même intérêt à ce que ceux qui savent en faire soient libres d’en faire sans que l’Etat les en empêche. La liberté de Pasteur est précieuse, et pas seulement pour Pasteur.
Même si je n’ai aucun usage de la liberté de jouer de la musique, j’ai tout intérêt à ce que ceux qui savent jouer soient libres de le faire. La liberté de Beethoven est précieuse, et pas seulement pour Beethoven.
Même si je n’ai aucun usage de la liberté de tourner des films -je ne sais pas mettre en scène-, j’ai tout de même intérêt à ce que ceux qui savent le faire soient libre de le faire. La liberté de Kubrick est précieuse, et pas seulement pour Kubrick.
Même si je n’ai aucun usage de la liberté d’entreprendre, -je n’ai aucun talent pour créer une entreprise- j’ai tout intérêt à ce que ceux qui savent entreprendre faire soient libres de le faire. La liberté de Ford est précieuse et pas seulement pour Ford.
Défendre la liberté et celle des autres, même lorsqu’ils en font un usage que l’on ne comprend pas ou que l’on n’approuve pas, est de toute manière juste.
C’est souvent aussi utile. Utile pour soi, utile pour les autres.
La défense du droit à la propriété n’est pas un truc de puissant.
Les puissants n’ont jamais eu de problème pour défendre leur propriété.
Du Soudan pendant la guerre civile au seigneur du Moyen Age, ceux qui usent de la violence n’ont aucun problème pour disposer et jouir de leur propriété.
Ils la défendent eux-mêmes avec beaucoup d’efficacité -et volent d’ailleurs aussi parfois celle des autres-.
Après une nuit d’émeute, ce n’est jamais la Audi avec des vitres fumées que l’on retrouve calcinée dans sur le parking d’une cité. C’est la clio d’occasion. Les puissants protègent toujours très bien leur propriété.
La défense du droit de propriété est une nécessité pour les plus pauvres ou les plus faibles.
Les plus pauvres n’ont pas besoin qu’on viole le droit à la propriété en leur nom, leur force de travail est suffisante pour les sortir de la pauvreté. Ils ont besoin qu’on protège leur droit à la propriété contre les puissants violents et contre la rapacité des étatistes qui prétendent parler en leur nom mais qui ne font qu’étendre une bureaucratie gourmande.
L’affaiblissement du droit à la propriété est une tendance lourde dans nos sociétés dominées par l’Etat Nounou.
Pour un oui ou pour un non, les étatistes violent le droit à la propriété, pour décider de l’usage du fruit de notre travail à notre place. Les niveaux de prélèvements obligatoires et de dettes ont atteint un niveau inimaginable en temps de paix.
Et là encore, les premières victimes de cette confiscation sont les plus pauvres.
Les plus pauvres qui subventionnent les grandes banques, l’industrie agroalimentaire, l’industrie militaire, l’industrie pharmaceutique, la lourde bureaucratie locale et nationale et une liste interminable de lobbies divers vivant sous le parapluie de l’Etat.
Le tout sous couvert de justice sociale. C’est un marché de dupes. Les pauvres n’ont pas besoin que l’on viole la propriété des autres à leur profit pour avoir une vie bonne. Ils ont au contraire plus besoin que les autres que le droit à la propriété soit scrupuleusement défendu par l’Etat.
Si les plus pauvres pouvaient disposer d’une plus large partie du fruit de leur travail, il est très probable qu’ils seraient beaucoup plus exigeants dans la façon dont l’argent est dépensé. Pour une éducation qui ne laisse pas en chemin leurs enfants, pour une santé sans surcoût etc…
Le viol du droit de la propriété ne profite jamais aux pauvres mais aux étatistes et à ceux qui vivent sous perfusion de l’Etat Nounou.
Les pauvres plus que les autres n’ont pas besoin d’un Etat Nounou, ils ont besoin d’un Etat libéral qui défend leurs droits naturels, en particulier leur droit à la propriété.
Comme les lecteurs ont bien compris, il y a donc (parfois) une différence entre le droit naturel et la loi.
Cela se traduit par l’accaparation de biens, légale au regard de la loi, mais illégitime au regard du droit naturel.
Posséder, même légalement, quelque chose ne veut pas dire que l’on en est le propriétaire légitime au regard du droit naturel.
Si le bien a été acquis par la corruption, par des privilèges étatiques, par un échange forcé, par le vol, par le pillage pur et simple d’un despote, ce bien n’est pas légitime au regard du droit naturel, même si le pillard a un petit bout de papier d’un Etat qui dit que c’est à lui.
Il se murmure par exemple que des milliardaires russes, des dictateurs africains, des propriétaires terriens d’Amérique du Sud n’ont pas bâti leur fortune immense sur leur seul talent, leur travail ou des échanges libres avec leur concitoyens. Et que des exemples similaires se trouvent aussi chez nous chez des messieurs bien sous tout rapport en costumes trois pièces.
Nous approchons du sommet :
Nous avons donc cinq couches.
Première couche : la raison est un outil qui permet d’approcher la connaissance de la loi naturelle.
La deuxième couche, c’est la nature du Pont, la loi naturelle.
La troisième couche, ce sont les droits naturels que l’on peut déduire de cette loi naturelle.
La quatrième couche, ta..ta…ta..tin…c’est enfin le droit naturel himself.
Nous y voilà.
Le Droit Naturel, c’est l’émergence au fil du temps et des situations d’un corpus de règles respectant les droits naturels, et adaptées à l’infinité de situations posées par les relations entre individus.
Le droit naturel, ce sont les règles au jour le jour, renforçant la loi naturelle, c’est-à-dire permettant de nouer des relations tout en protégeant l’autonomie de chacun.
Après les sommets métaphysiques où Kant interpelle Aristote qui discute avec Hume sous l’œil de Locke, le droit naturel ce sont des millions de règles de bon sens, parfois très terre à terre, permettant de trancher les conflits dans le respect de la justice.
Le droit naturel peut donc varier (doucement) selon les époques ou les cultures, tout en étant respectueux de la loi naturelle.
Par exemple, pour le droit naturel pontain, dans la culture maya ou les ponts sont des lianes attachées de part et d’autres d’un précipice, la règle générale « le tablier du pont ne doit pas avoir de trou » se déclinera en une multitude de règles particulières :
« Si un lama fait un trou dans le tablier en marchant sur le pont, il s’agit de l’usage normal et le propriétaire du lama ne sera pas tenu responsable, par contre si le lama broute la liane du pont, le propriétaire du lama sera responsable.
S’il s’agit d’un troupeau de …. »
Des règles en occident parleront sans doute plutot de 33 tonnes et d’autobus et sur la banquise des traineaux..
On constate donc qu’à partir d’une nature pontaine universelle, il y a de nombreuses déclinaisons du droit naturel selon la culture ou la période.
Cela ne veut évidement pas dire que toutes les lois sont conformes au droit naturel… Une loi qui dirait « Le seigneur local a le droit de brûler le pont selon son bon vouloir » ne serait pas conforme au droit naturel : il y aurait rupture de l’égalité et violation du droit à la propriété.
Certains individus et cultures peuvent se tromper sur la nature du pont, sur la loi naturelle pontaine… ou sans se tromper sur les règles permettant de respecter la nature du pont, se tromper sur la conformité des règles du droit naturel par rapport à la nature du pont.
Que d’occasions de se tromper pour la Nature Pontaine… Ca donne une idée pour la Nature Humaine…
La loi positive s’appelle ainsi non parce qu’elle met les avocats de bonne humeur le matin, mais parce qu’elle est la loi posée et imposée par les Etats. C’est la loi à laquelle nous avons à faire tous les jours, du code civil au code pénal.
La majorité des partisans du droit naturel reconnaissent et acceptent le rôle de la loi positive… Simplement ils affirment qu’elle ne peut être bonne qu’à condition de se conformer au droit naturel.
Les partisans du droit naturel ne sont donc pas des adversaires des lois positives, ils sont les adversaires des positivistes. Pour les positivistes une loi est légitime à partir du moment où elle se conforme à des règles de cohérence interne et de formalisme ainsi qu’à la légitimité de l’organisation qui l’a posée (un Etat donc).
Pour les partisans du droit naturel, la cohérence est effectivement nécessaire mais elle n’est pas suffisante pour assurer la légitimité d’une loi. Pas davantage que son origine -un Etat-, même démocratique. La démocratie n’est qu’un moyen -le pire à l’exception de tous les autres- d’éviter la profusion de lois illégitimes, mais elle n’est pas une source de légitimité. Les lois racistes de la ségrégation étaient des lois « démocratiques ». Une loi est légitime lorsqu’elle est conforme au droit naturel.
Une partie importante de la loi positive est d’ailleurs conforme à cette définition. La Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 a une jolie influence.
Actuellement, notre classe politiques étatiste considère avec de plus en plus de légèreté que la loi peut être tout ce que leur imagination fertile invente, c’est-à-dire une longue litanie de commandements à destination des citoyens-sujets.
Au XX ème siècle, les totalitarismes ont été les principaux adversaires du droit naturel, au XXI ème ce sont les Etats-Nounous qui ont pris le relais avec un enthousiasme inquiétant.
Pour le législateur soucieux de respecter le droit naturel, poser une nouvelle loi ou en modifier une ancienne est donc un exercice lourd, compliqué et grave.
Poser une loi, c’est poser un fusil sur la tempe de dizaines de millions de personnes pour les forcer ou leur interdire de faire ce qu’ils auraient peut-être choisi de faire sans ce fusil.
C’est un fusil même pour des décisions insignifiantes. Vous pouvez essayer de refuser de payer une contravention, une fois, deux fois. Un homme en uniforme vous apportera une lettre recommandée. Si vous refusez toujours de payer, tôt ou tard un huissier viendra vous voir, puis reviendra avec la police. Si vous résistez à la police, tôt ou tard, vous finirez par vous trouver face à un fusil.
Poser une loi est donc un acte grave. Nous devrions avoir des chirurgiens du cerveau. Des chirurgiens soucieux et conscients de leurs responsabilités, plongés dans de longues réflexions..
Cette loi est-elle juste ?
Permettra-t-elle de nouer des relations justes ou est-ce un commandement infantilisant?
Est-elle vraiment nécessaire ?
Nous devrions avoir des chirurgiens du Droit perdant des nuits de sommeil sous le poids de cette responsabilité immense : braquer un fusil sur la tempe de dizaines de millions de personnes.
Nous avons des cowboys bourrés qui entrent dans le saloon et tirent dans tous les coins en hurlant des insanités.
Nous avons des ministres qui à peine en poste ont déjà pondu cinq textes sans queue ni tête à annoncer au journal de 20 heures.
Nous avons des députés votant sans sourciller des textes interminables, contradictoires, illisibles pour gérer la taille des canines des hamsters nains sauvages des Pyrénées.
Nous devrions avoir des shérifs de la qualité législative, sobres, calmes et rigoureux. Et nous nous retrouvons obligés de nous planquer, de ramper ou de danser en permanence pour éviter les balles perdues de ces cowboys bourrés démagogiques.
Aujourd’hui, ceux qui devraient être garants de l’ordre sont les principaux pourvoyeurs de chaos et d’injustice.
La justice est un mot qui se tient tout seul. Il n’a pas besoin d’être adossé à un autre pour avoir du sens.
Comme l’expression « musique militaire », lorsque l’on rajoute quelque chose à justice c’est en général pour dire quelque chose qui n’a plus grand chose à voir avec la justice. Justice sociale par exemple.
La justice, c’est l’application du droit naturel, conforme à la loi naturelle et à la nature humaine, universellement accessible par la droite raison. La Justice est universelle, égale pour tous et se dispense de commandements.
La Justice sociale, c’est un marécage constructiviste qui consiste principalement à fouler aux pieds la justice pour flatter l’égo des étatistes en prétendant aider les plus pauvres.
La justice sociale n’est ni juste, ni sociale. Elle usurpe le nom de justice pour cacher un nombre incalculable de décisions arbitraires et de faits du prince.
La recherche de la justice est un idéal accessible. La justice sociale est un chapeau sans fond d’où les étatistes sortent continuellement de nouvelles idées pour augmenter leur pouvoir. En substituant à la justice la justice sociale comme horizon politique indépassable, ces derniers se rendent toujours plus indispensables au détriment de l’harmonie dans la société.
Les pauvres comme chaque individu de la société n’ont pas besoin de justice sociale, de justice raciale, de justice sexuelle, de justice environnementale, de justice ceci ou cela et tous les ersatz que pondent quotidiennement les étatistes pour se faire mousser. Ils ont besoin de la Justice.
La Justice, c’est-à-dire le respect de la vie, l’individualité, la raison de chaque individu, favoriser les relations respectueuses des droits naturels de chacun.
Comme M Jourdain fait de la prose, beaucoup de gens font du droit naturel sans le savoir.
De l’enfance à l’age adulte, « ce n’est pas juste » est une phrase universelle… une attente cruciale pour la vie dans toute société dès la cour de maternelle.
Cela ne signifie pas que toutes les frustrations, les jalousies ou les souffrances soient des injustices. Seuls l’usage de la raison, l’observation de la nature de humaine peuvent le déterminer.
La tradition du droit naturel a pris le taureau par les cornes et a commencé l’exploration de cet immense domaine.
Toutes les théories qui en sont issues partagent –malgré des divergences- un certain nombre de conclusions :
– La justice préexiste à l’Etat et toutes les lois posées par le législateur doivent s’y conformer.
– La raison permet de découvrir la justice, le droit naturel, la loi naturelle.
Elle n’invente pas la justice, elle découvre quelque chose qui ne dépend pas d’elle.
– Les Hommes sont des individus libres, égaux, autonomes, doués de raison et vivant en société. Le droit naturel permet l’émergence d’une société respectant ces caractéristiques.
Les théories du droit naturel ne sont pas achevées, mais chacune d’entre elles est finalement plus aboutie que les théories niant l’existence d’une justice universelle conforme à la nature de l’Homme.
Les adversaires du droit naturel, qu’ils soient relativistes, nihilistes ou simplement sceptiques débouchent sur des contradictions bien plus conséquentes que les difficultés liées à la démarche du droit naturel… Et souvent ne tirent pas les conséquences de leurs propres théories pour leur vie personnelle comme pour la politique qu’ils défendent. Des gros bouts de droit naturel sont conservés discrètement en creux.
La tradition du droit naturel est aujourd’hui oubliée, mais elle est le dallage sur lequel notre civilisation a émergé et se maintient encore aujourd’hui. Heureusement, il y a encore de beaux restes…
De beaux restes mais pas assez. Et beaucoup de nos difficultés qu’elles soient sociales, morales ou économiques viennent de cet oubli. Il est probable que le droit naturel chassé par la porte revienne par la fenêtre dans les prochaines décennies.
« C’est pas juste » a de l’avenir, et cet avenir passera forcément par les connaissances déjà accumulées dans ce domaine… la tradition du droit naturel.
Toutes les fois donc que la puissance législative violera cette règle fondamentale de la société, et, soit par ambition, ou par crainte, ou par folie, ou par dérèglement et par corruption, tâchera de se mettre, ou de mettre d’autres, en possession d’un pouvoir absolu sur les vies, sur les libertés, et sur les biens du peuple, par cette brèche qu’elle fera à son crédit et à la confiance qu’on avait prise en elle, elle perdra entièrement le pouvoir que le peuple lui avait remis pour des fins directement opposées à celles qu’elle s’est proposées, et il est dévolu au peuple qui a droit de reprendre sa liberté originaire, et par l’établissement d’une nouvelle autorité législative, telle qu’il jugera à propos, de pourvoir à sa propre conservation, et à sa propre sûreté, qui est la fin qu’on se propose quand on forme une société politique. »
John Locke – Traité de gouvernement civil