Antigone, c’est une femme seule qui affirme face au despote Créon qu’il existe des Droits que même-lui, le législateur, n’a pas le droit de piétiner.
Et que s’il le fait, il prouvera simplement qu’il a la force, qu’il a le pouvoir, mais pas le Droit.
Antigone pose ainsi la première pierre de cette tradition du Droit naturel.
« Créon :
Et ainsi, tu as osé violer [mes] lois ?Antigone :
C’est que Zeus ne les a point faites, ni la Justice qui siège auprès des Dieux souterrains.Et je n’ai pas cru que tes édits pussent l’emporter sur les lois non écrites et immuables des Dieux, puisque tu n’es qu’un mortel.
Ce n’est point d’aujourd’hui, ni d’hier, qu’elles sont immuables ; mais elles sont éternellement puissantes, et nul ne sait depuis combien de temps elles sont nées.
Je n’ai pas dû, par crainte des ordres d’un seul homme, mériter d’être châtiée par les Dieux »
Chez Antigone, cette opposition aux lois du despote s’appuie sur la volonté des Dieux, mais la tradition du Droit naturel s’appuie ensuite sur la raison pour poursuivre un long cheminement à travers les siècles.
C’est-à-dire des droits qui ne sont pas décrétés par l’Etat, mais attachés à la nature même de l’être à laquelle ils sont appliqués. En l’occurrence l’Etre Humain.
On retrouve cette tradition chez Saint Thomas d’Aquin qui affirme que ces Droits ne sont pas révélés, mais qu’ils peuvent être connus par la raison.
« Il y a deux sortes de préceptes qui ne sont pas du nombre des préceptes du Décalogue : d’une part, les préceptes premiers et généraux, qui n’ont pas besoin d’être déclarés autrement que par leur insertion dans la raison naturelle au titre de connaissance immédiate, comme de ne faire de tort à personne et autres du même genre ; et, d’autre part, ceux dont la convenance se découvre aux sages après une étude attentive, car c’est à travers l’enseignement des sages que ces préceptes parviennent de Dieu au peuple. »
Somme Théologique – Thomas D’Aquin
Elle apparait ensuite chez John Locke pour transparaitre à chaque article de la déclaration de Droits de l’Homme de 1789.
« L’état de nature est régi par un droit de nature qui s’impose à tous ; (…) nul ne doit léser autrui dans sa vie, dans sa santé, sa liberté et ses biens. » (John Locke, Second Traité du Gouvernement civil, II)
« Les représentants du peuple français,
constitués en Assemblée nationale, considérant que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de l’homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements,
ont résolu d’exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l’homme, »
La tradition du Droit naturel est ensuite portée par les libéraux de Frédéric Bastiat à Murray Rothbard.
« Ce n’est pas parce que les hommes ont édicté des Lois que la Personnalité, la Liberté et la Propriété existent. Au contraire, c’est parce que la Personnalité, la Liberté et la Propriété préexistent que les hommes font des Lois. »
Frédéric Bastiat – La loi
Ces Droits naturels sont :
La vie et la sécurité.
Les êtres humains sont les uniques propriétaires de leur vie, de leur corps, de leur intelligence, de leurs sentiments.
Ils ont le Droit naturel à la sécurité dans la mesure où ils respectent les Droits naturels des autres.
La liberté.
C’est-à-dire, qu’ils sont libres de définir leur objectifs et les moyens pour y parvenir tant qu’ils ne violent pas le Droit naturel des autres..
Ils sont libres de l’usage qu’ils font de leur temps comme ils le souhaitent tant qu’ils ne violent pas le Droit naturel des autres.
Ils sont libres de travailler ou de se reposer, de haïr ou d’aimer, d’épargner ou de jouir, de mépriser ou de respecter, de parler ou de se taire, de créer ou de conserver, de prier ou de raisonner tant qu’ils ne violent pas le Droit naturel des autres.
Ils sont libres d’échanger, échanger culturellement, économiquement, sentimentalement avec qui ils souhaitent, aux conditions qu’ils souhaitent tant qu’ils laissent les autres libres de s’abstenir d’échanger avec eux.
Ils ont un Droit naturel à la liberté.
La propriété.
En faisant usage de leur intelligence, de leur connaissance, grâce à leur travail ou leurs échanges libres, les êtres humains peuvent acquérir des biens. Ces biens leur appartiennent légitimement et nul ne peut les en priver sans violer leur droit de définir leurs objectifs et leurs moyens, c’est-à-dire sans violer leur droit à la liberté.
Ils ont un Droit naturel à la propriété dans la mesure où ils respectent les Droits naturels des autres.
Ces Droits naturels ne dépendent pas la volonté du gouvernement, ils ne sont pas des cadeaux de l’Etat selon son bon vouloir.
C’est le contraire, c’est l’Etat qui est une création des individus. Des individus regroupant une petite partie de leurs ressources pour protéger leurs Droits naturels.
Les individus ne sont pas soumis à l’Etat, c’est le contraire.
Les individus ne doivent pas leur existence à l’Etat, c’est le contraire.
Les individus n’ont pas donné la force à l’Etat pour qu’ils régentent leurs vies, ils ont prêté leur force temporairement à l’Etat avec le mandat limité de protéger leurs Droits naturels.
2400 ans après Antigone, nos gouvernements, nos législateurs sont devenus fous. Ivre du pouvoir de l’Etat, parce qu’ils ont la force, ils s’imaginent qu’ils ont droit.
Le droit de s’immiscer dans la vie de chaque individu pour lui dire quoi penser, comment vivre, qui aimer, qui détester, comment partager.
Le droit de construire à coup de lois de mal faites, infantilisantes, un marécage législatif obligeant ou interdisant ce qui devrait être du seul choix et ressort de l’individu.
Le droit de prélever sans limite le fruit de leur travail ou de leurs échanges.
Le droit d’interdire des échanges ou d’en forcer d’autres.
Le droit de rabaisser en permanence l’individu tout en se prétendant à l’origine de ce qui ne peut venir que l’individu : la solidarité, la culture, la production, le savoir.
Le droit de semer la peur pour se poser en protecteur des individus contre les aléas de la vie alors que la protection ne peut venir que des individus eux-mêmes, seuls ou s’associant librement.
Le droit de semer la discorde en regroupant artificiellement les individus en petit tas aux intérêts contradictoires pour mieux asseoir leur pouvoir, violant les Droits naturels des individus appartenant à certains petits tas au profit d’autres petits tas.
Ils n’ont pas le droit.
Ils n’ont pas le droit de violer les Droits naturels de chaque individu.
Comme le roi Créon, Ils ont la force, la force de l’Etat, ils ont le pouvoir mais ils n’ont pas le Droit. Même élus démocratiquement, même en prétendant faire le bien.
Les progressistes qui veulent forger par la force une société juste ou harmonieuse au mépris des Droits naturels, ne valent pas mieux que le roi Créon -ou que les conservateurs avant eux-.
Il faut remettre l’Etat et ses gouvernements de droite comme de gauche à sa juste place.
Le collectif Antigone veut rappeler à ces rois Créon qui nous gouvernent, de gauche comme de droite, qu’ils n’ont pas le droit de violer les Droits naturels des individus.
Le collectif Antigone souhaite contribuer à remettre l’Etat et ses gouvernements à sa juste place.